- GALLICANS (RITE ET CHANT NÉO-)
- GALLICANS (RITE ET CHANT NÉO-)GALLICANS RITE & CHANT NÉO-Mouvement liturgique du XVIIe siècle, surtout français. Bien qu’il faille éviter d’établir un parallèle trop étroit avec le gallicanisme politique, on constatera une certaine ressemblance d’attitude ici et là en raison du fait que les évêques revendiquaient une certaine autonomie et s’estimaient les seuls juges des adaptations à effectuer sur les pièces ou les rites non romains, après les réformes du concile de Trente concernant le chant et la liturgie. Il existait en effet de nombreux usages et coutumes propres aux diocèses (messes et offices particuliers pour célébrer les saints locaux) qui demandaient à être préservés et maintenus. Comme l’Église de France, au XVIIe siècle, comptait un nombre non négligeable d’érudits, ceux-ci voulurent corriger le style de certaines pièces écrites en un latin tardif qu’ils estimaient décadent. Leur effort s’appliqua à la réforme des textes (bréviaire, missel, rituel, graduel, antiphonaire). L’influence de ce mouvement se fit sentir dans quelques diocèses allemands et hollandais.En matière liturgique, les réformateurs protestèrent, en assemblée du clergé (1650), contre les additions romaines faites au pontifical (sous le pape Urbain VIII). Clément IX condamna en 1661 le Rituel publié par l’évêque d’Alet-les-Bains (Aude), mais vingt-neuf évêques français n’acceptèrent pas cette condamnation, estimant qu’ils étaient juges en la matière («Comme les évêques sont les vrais docteurs de l’Église, personne n’a le droit de s’élever contre leur doctrine, à moins qu’ils ne soient tombés dans des erreurs manifestes»). À partir de 1678 furent publiés plusieurs bréviaires particuliers à quelques diocèses (Vienne, Paris, Cluny, Orléans, Sens). Le premier essai de réforme du missel fut tenté en 1709 (Missel de Meaux , qui insérait un Amen après la consécration, invitant de ce fait le célébrant à réciter le canon à haute voix... comme le IIe concile du Vatican devait l’admettre); il fut condamné par l’évêque Henri de Thyard de Bissy, et la polémique se poursuivit. Ce fut la fin de ce qu’on peut tenir pour une première période. La seconde s’ouvre avec la publication du bréviaire de l’archevêque Charles de Vintimille (1736), dont les auteurs Vigier, Mésenguy et Coffin étaient jansénistes. C’est surtout pour cette raison qu’il y eut des difficultés pour l’adoption généralisée de ce bréviaire, lequel proposait de très heureuses nouveautés (par exemple, importance nouvelle accordée aux textes scripturaires et patristiques). Plusieurs diocèses l’adoptèrent (Blois, Évreux, Séez) ou s’en inspirèrent (Toulouse, Tours, Chartres, Vienne). Le Parlement de Paris l’approuva. Quant au Missale parisiense (1739) de Mésenguy, il remplaça la liturgie romaine dans le diocèse de Paris. En 1789, les deux tiers des diocèses français avaient abandonné le rituel romain et le formulaire liturgique. Ce n’est que sous les coups répétés de l’ultramontanisme du XIXe siècle et grâce aux efforts de l’école de Solesmes (Dom Guéranger, 1805-1875) que les réformes néo-gallicanes disparurent peu à peu. On peut déplorer, sur bien des points, l’abandon de coutumes et d’usages locaux de valeur; mais on constatera que bien des réformes du IIe concile du Vatican n’ont fait que reprendre ce que les néo-gallicans avaient déjà proposé.En musique sacrée, il est exclu de parler d’un chant néo-gallican proprement dit. On rappellera d’abord que le grégorien traditionnel accusait une forte décadence, laquelle provenait en partie du fait que les variantes mélodiques abondaient depuis l’apparition des éditions imprimées; le rythme d’autrefois était oublié. Malgré les injonctions du concile de Trente en faveur d’une restauration du chant liturgique, rien de satisfaisant n’avait vu le jour (on ne peut accepter les remaniements de Palestrina, ni ceux de l’édition médicéenne — 1614-1615 — laquelle influença profondément tous les projets postérieurs). On fera une place à part à l’Église de Lyon, qui conserva les mélodies traditionnelles du plain-chant en évitant une décadence manifeste partout ailleurs. Dans la médicéenne, beaucoup de mélismes sont supprimés, on ne conserve que le début et la fin des vocalises; ce faisant, on ne fait d’ailleurs que systématiser les corrections qui furent pratiquées dès la fin du XVIe siècle. On applique au chant des règles quantitatives et l’on groupe des notes sur les accents; on ne pouvait admettre que les syllabes faibles puissent posséder plusieurs notes et les syllabes fortes une seule. De telles modifications furent effectuées bien avant ce que nous avons dit à propos de la liturgie néo-gallicane. Il semble donc exclu d’employer cette expression à leur sujet. Cependant, on verra une analogie entre les deux efforts de renouveau, dans le mouvement dit en faveur du plain-chant musical . Il donna lieu à la composition d’hymnes, selon les principes de la musique mesurée (Attende Domine ; Rorate cæli desuper ; le petit Salve Regina ). Bref, on peut estimer que l’œuvre des correcteurs, G. Nivers, C. Poisson, Lebeuf, La Feillée, n’est pas une interprétation, mais une refonte totale du grégorien. Enfin il y a les fameuses Cinq Messes en plain-chant musical (1699) de Henry Du Mont. C’est peut-être à leur sujet que le qualificatif de néo-gallican conviendrait le mieux; en effet, le compositeur se refuse systématiquement dans son projet à écrire du grégorien; il obéit aux principes de la tonalité moderne; seuls comptent pour lui le majeur et le mineur; même s’il demeure discret, il utilise le chromatisme et le dièse. Quoi qu’on puisse en penser du point de vue esthétique, c’est une erreur en tout cas que d’avoir voulu lui appliquer, pour son exécution, les principes rythmiques et mélodiques du grégorien; ces malheureux essais de certains solesmiens au début du XXe siècle doivent être abandonnés. Solange Corbin admet que «le succès des messes de Du Mont peut s’expliquer aussi bien parce qu’elles se prêtent admirablement à l’interprétation chorale par une assemblée qui en goûte le rythme facile, bien cadencé».
Encyclopédie Universelle. 2012.